Fin de l'ARENH
Marché de l'énergie Réglementation

Fin de l’ARENH en 2025 : quelles conséquences pour les contrats d’électricité professionnels ?

Publié le 8 août 2025

Qu’est-ce que l’ARENH : principes et rôle dans le marché de l’électricité 

L’Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique (ARENH) est un dispositif instauré par la loi NOME du 7 décembre 2010, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité en France. Il permet aux fournisseurs alternatifs d’acquérir une partie de la production nucléaire d’EDF à un prix défini, afin de leur permettre d’offrir aux consommateurs des tarifs compétitifs. 

Les objectifs de l’ARENH 

L’ARENH a pendant plusieurs années permis de répondre à plusieurs objectifs stratégiques, à la fois économiques, concurrentiels et politiques : 

1. Encourager une véritable ouverture à la concurrence 

Le marché français de l’électricité a été pendant longtemps sous le monopole d’EDF. Sa libéralisation est intervenue sous l’impulsion des directives européennes.

Dans les faits, l’ouverture restait limitée par un déséquilibre majeur. EDF contrôlait la production, la distribution et la fourniture. L’entreprise bénéficiait d’un avantage compétitif considérable grâce à son parc nucléaire amorti.

Pour corriger cette situation, l’ARENH a vu le jour. Ce mécanisme a permis aux fournisseurs alternatifs d’accéder à une partie de la production nucléaire d’EDF à un prix régulé de 42€/MWh.

Grâce à cette base de coûts stable, les fournisseurs pouvaient construire des offres concurrentielles. Mais aussi, mieux rivaliser avec les tarifs réglementés d’EDF.

2. Proposer des prix compétitifs aux consommateurs 

Le second pilier de l’ARENH était de faire bénéficier les consommateurs des coûts historiquement faibles du nucléaire français. En accédant à une électricité à bas prix, les fournisseurs pouvaient proposer des offres attractives, favorisant une baisse ou une modération des tarifs sur le marché libre

Grâce à ce levier, l’État espérait que les consommateurs – particuliers comme entreprises – puissent profiter indirectement du parc nucléaire national, déjà amorti, et bénéficier d’une énergie stable, peu carbonée et bon marché, sans dépendre des variations parfois extrêmes des marchés internationaux. 

Cette logique était particulièrement importante pour les PME, industriels ou collectivités, pour qui l’électricité constitue un poste de dépense sensible. 

Le fonctionnement de l’ARENH 

Depuis son entrée en vigueur en juillet 2011, le dispositif ARENH impose à EDF de revendre jusqu’à 100 térawattheures (TWh) par an d’électricité issue de son parc nucléaire historique aux fournisseurs alternatifs. Ce volume représente environ un quart de la production nucléaire annuelle française. L’objectif ? Offrir aux acteurs du marché une base de fourniture compétitive, n’ayant pas d’accès direct aux moyens de production d’EDF. 

Chaque année, les fournisseurs alternatifs formulent une demande de volumes d’ARENH en fonction de leurs besoins prévisionnels. C’est la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) qui instruit ces demandes et répartit les volumes disponibles entre les fournisseurs, au prorata du nombre de clients ou de leur consommation

Cependant, le dispositif est plafonné : lorsque la somme des demandes dépasse le plafond autorisé de 100 TWh (ce qui est fréquemment le cas), la CRE procède à un « écrêtement ». Autrement dit, chaque fournisseur reçoit une fraction réduite de sa demande, et doit alors acheter le solde manquant sur le marché de gros, à des prix souvent bien supérieurs au tarif ARENH. 

La place du nucléaire dans la production française 

Le parc nucléaire français, entièrement exploité par EDF, représente environ 65% de la production d’électricité du pays selon RTE en 2023. Ce choix énergétique, amorcé dans les années 1970, a permis à la France de réduire sa dépendance aux énergies fossiles et de garantir une certaine stabilité des prix de l’électricité. L‘ARENH prolonge cette “rente du nucléaire” en offrant aux fournisseurs alternatifs un accès à cette production à moindre coût. 

Le volume alloué et mécanisme d’écrêtement 

Comme nous l’avons expliqué, le volume annuel d’ARENH est plafonné à 100 TWh. Cependant, les demandes des fournisseurs dépassent régulièrement ce plafond. Par exemple, pour l’année 2025, les demandes ont atteint 134,93 TWh, entraînant un taux d’écrêtement de 25,88%. Cela signifie que les fournisseurs n’ont reçu que 74,12% de la quantité demandée, les obligeant à se tourner vers le marché de gros pour le reste de leurs besoins, souvent à des prix plus élevés. 

Taux d'écrêtement

Les nouvelles règles du marché post-ARENH 

L’ARENH (Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique) permettait aux fournisseurs alternatifs d’acheter de l’électricité nucléaire à un tarif réglementé fixé par l’État. Ce dispositif créait ainsi les conditions d’une concurrence saine entre EDF et les acteurs alternatifs. Conçu dès l’origine pour une durée limitée, son arrêt le 31 décembre 2025 représente une rupture majeure sur le marché français.

À partir de cette date, les fournisseurs achèteront la totalité de leur électricité directement sur le marché de gros. Là où les prix évoluent selon l’offre et la demande. Ces prix deviennent donc plus volatils. Pour les entreprises, cette situation implique une augmentation possible de la volatilité de leurs coûts énergétiques. Elle nécessite également d’optimiser la gestion de leurs contrats.

Le Versement Nucléaire Universel (VNU) 

Dès le 1er janvier 2026, le Versement Nucléaire Universel (VNU) prendra le relais de l’ARENH. Ce changement, introduit par la loi de finances 2025 et inscrit dans le code de l’énergie, constitue une réforme d’envergure du marché français de l’électricité. 

Le VNU poursuit une double ambition. D’une part, il permet à EDF de vendre son électricité à des prix qui reflètent mieux les coûts réels de production du nucléaire. D’autre part, il protège les consommateurs contre les hausses tarifaires liées aux fluctuations du marché de gros.

Contrairement à l’ARENH, qui obligeait EDF à vendre une partie de sa production à prix fixe à ses concurrents alternatifs, le VNU supprime ce tarif préférentiel. Désormais, 100% de la production nucléaire se vend au prix du marché. Toutefois, un dispositif correctif intervient pour redistribuer en cas de prix élevés.

Comment fonctionne le Versement Nucléaire Universel ? 

Le VNU repose sur un principe simple mais efficace. EDF vend son électricité nucléaire directement sur le marché libre.

Lorsque le prix de l’électricité dépasse un plafond de référence — estimé autour de 80€/MWh — EDF génère des revenus supplémentaires. Une partie de ces revenus revient alors aux consommateurs sous forme de compensation.

Deux seuils de redistribution sont envisagés à ce stade, mais restent à confirmer par les autorités compétentes : 

  • Au-delà de 78-80€/MWh, EDF reverserait 50% des bénéfices excédentaires ; 
  • Au-delà de 110€/MWh, cette ponction monterait à 90% des revenus additionnels. 

Le VNU repose sur un principe simple mais efficace. En 2026, le mécanisme de redistribution ne devrait pas s’activer. En effet, les prix du marché de gros restent actuellement, en moyenne, en dessous des seuils envisagés.

Cependant, le marché de l’électricité reste très sensible aux évolutions géopolitiques. Une redistribution reste donc possible et ne peut être totalement écartée.

Le saviez-vous ?

Ces versements seront gérés par la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) qui veillera à leur redistribution équitable. Ce dispositif universel s’appliquera à toutes les entreprises, quel que soit leur fournisseur, et visera à limiter l’impact des pics de prix sur les factures énergétiques.

L’impact sur les contrats professionnels 

Pour les entreprises qui ne s’y préparent pas, cette évolution peut se traduire par plusieurs impacts concrets sur leurs contrats d’électricité : 

  • Plus grande exposition à la volatilité : Les contrats professionnels peuvent devenir plus sensibles aux variations saisonnières et aux événements exceptionnels qui influencent les cours de l’électricité, comme les périodes de forte demande ou les tensions sur la production nucléaire ;
  • Nécessité d’adaptation : Les entreprises devront porter une attention renforcée à leur profil de consommation et à la gestion fine de leurs contrats. La prise en compte des heures de consommation et la négociation d’offres adaptées deviendront essentielles pour maîtriser les coûts. 

Enfin, bien que le VNU apporte une régulation plus dynamique que l’ARENH, son efficacité dépendra de la stabilité des marchés et de la manière dont les mécanismes de redistribution seront appliqués. 

Comment les professionnels peuvent-ils se préparer ? 

Pour naviguer dans le nouveau paysage énergétique post-ARENH, plusieurs stratégies peuvent être envisagées : 

  • Trouvez le bon fournisseur d’électricité : Comparez les offres de différents fournisseurs pour identifier celles qui correspondent le mieux à vos besoins en termes de prix, de services et de flexibilité ; 
  • Contrats à long terme : Envisagez de négocier des contrats à long terme pour sécuriser vos coûts énergétiques et bénéficier de conditions tarifaires avantageuses ; 
  • Optimisation de la consommation : Investissez dans des solutions d’efficacité énergétique pour réduire votre consommation et, par conséquent, vos coûts. Cela peut inclure l’adoption de technologies plus économes en énergie ou la mise en place de pratiques de gestion énergétique plus efficaces. 

Pour les industries à forte consommation, les contrats d’allocation de production nucléaire (CAPN) offrent une solution concrète. Ces contrats permettent de sécuriser une partie de l’approvisionnement à un prix plus stable, et cela sur plusieurs années. Ils réduisent ainsi le risque financier lié aux fluctuations du marché.

En adoptant ces stratégies, les entreprises se préparent à la fin de l’ARENH. Elles saisissent aussi les opportunités offertes par le marché de l’électricité.