Gestion des déchets pros
Conseils & stratégies Réglementation Transition énergétique

Gestion des déchets : un enjeu stratégique pour les entreprises et collectivités

Publié le 23 octobre 2025

Pourquoi la gestion des déchets est devenue incontournable

Des volumes colossaux de déchets

Selon l’ADEME1, les ménages français ont produit environ 34 millions de tonnes de déchets, soit 500 kg par habitant en 2020. Cette quantité est déjà significative. Mais les activités économiques en génèrent bien plus : près de 277 millions de tonnes de déchets. Cela représente plus de 8 fois le volume produit par les ménages.

Dans le détail :

  • Le secteur du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP) reste le principal producteur avec 213 millions de tonnes, représentant près de 77% des déchets des entreprises ;
  • Les autres entreprises – génèrent environ 64 millions de tonnes, soit 23% du total des résidus professionnels.

Ces chiffres mettent en lumière l’ampleur des enjeux liés à la gestion des déchets en entreprise : réduire, trier et valoriser n’est plus une simple bonne pratique, c’est une nécessité pour maîtriser les coûts, respecter la réglementation et contribuer à la transition écologique.

Un impact direct sur l’environnement

Cette production massive d’e déchets d’ordures a un effet considérable sur la transition écologique. Leur traitement, leur transport et leur élimination contribuent à la pollution des sols, de l’air et de l’eau, tout en augmentant les émissions de gaz à effet de serre (GES).

Un levier majeur au-delà de l’écologie

Longtemps perçue comme une contrainte administrative, la gestion des déchets en entreprise est aujourd’hui une composante clé de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE).

Bien menée, elle devient :

  • Un outil de conformité réglementaire ;
  • un moyen de réduire certains coûts ;
  • Un vecteur d’innovation et d’image de marque positive ;
  • Un signe fort d’engagement vis-à-vis des collaborateurs, clients et parties prenantes.
Gestion des déchets

Quels sont les types de déchets que l’on retrouve en entreprise ?

Pour mettre en place une gestion des déchets efficace et responsable, il est essentiel d’identifier les différentes catégories de déchets produits par une entreprise. Selon le secteur et les activités, leur nature peut varier, mais chacun requiert une attention particulière pour limiter l’impact environnemental et favoriser la valorisation des matières.

Les déchets dangereux

Ces résidus présentent des risques pour la santé humaine ou pour l’environnement : propriétés explosives, inflammables, toxiques, corrosives ou cancérogènes. Ils sont souvent identifiés par le sigle « HP » suivi d’un numéro, selon la classification européenne.

Exemples : certaines huiles usagées, produits chimiques, batteries ou équipements électroniques spécifiques. Leur collecte et traitement doivent passer par des filières spécialisées afin d’éviter toute contamination.

Les déchets d’activités économiques (DAE)

Les DAE regroupent tous les déchets issus des activités professionnelles, qu’ils soient dangereux ou non : matériaux usés, rebuts de production, déchets de maintenance… Une partie peut être assimilée aux déchets ménagers et bénéficier des mêmes filières de tri et de recyclage. Leur gestion nécessite souvent des solutions sur mesure, adaptées aux flux de production de chaque entreprise.

Les déchets assimilés aux ordures ménagères

Ces déchets, comparables à ceux produits par les foyers, incluent papiers, cartons, emballages, plastiques et certains déchets alimentaires. Ainsi, leur tri sélectif et leur recyclage sont essentiels pour réduire l’impact environnemental. Par ailleurs, l’installation de poubelles dédiées et de dispositifs de compostage dans les bureaux ou cantines facilite leur valorisation.

Les déchets inertes

Principalement issus du BTP et de la construction, ces déchets minéraux (béton, briques, tuiles, plâtre ou autre) ne se décomposent pas et ne présentent pas de réaction chimique dangereuse. Leur volume souvent important exige des solutions spécifiques pour le transport, le stockage et la valorisation, comme le recyclage en granulats pour la construction ou les remblais.

Les biodéchets

Les biodéchets regroupent les déchets alimentaires, végétaux et de cuisine, autrement dit tout ce qui est biodégradable et non dangereux. Longtemps considérés comme de simples rebuts, ils sont en réalité une ressource précieuse. Mal triés et envoyés en décharge, ils génèrent du méthane, un gaz à effet de serre au pouvoir réchauffant 25 fois supérieur au CO₂. Mais bien valorisés, ils deviennent une source d’énergie renouvelable et un allié pour les sols.

Le compostage transforme les biodéchets en un amendement riche qui nourrit la terre et réduit la dépendance aux engrais chimiques. La méthanisation, elle, produit du biogaz injecté dans le réseau ou utilisé localement, tout en fournissant un fertilisant naturel. Autrement dit, chaque reste de repas ou épluchure peut contribuer à l’économie circulaire et à la transition énergétique.

Les autres catégories de déchets

Au-delà des grandes familles de déchets, certaines entreprises produisent des déchets qui ne rentrent pas exactement dans les catégories précédentes. Il peut s’agir de déchets électroniques non dangereux (comme certaines pièces informatiques ou petits appareils) ou d’encombrants par exemple.

Cadre légal : ce que dit le Code de l’Environnement

Le principe fondateur : la responsabilité des producteurs

Selon l’article L541-2 du Code de l’Environnement, tout producteur ou détenteur de déchets est responsable de leur gestion, même lorsqu’il confie cette gestion à un prestataire externe. Cette responsabilité inclut le tri, le transport, le traitement, et s’étend jusqu’à l’élimination ou la valorisation finale des déchets. L’entreprise doit également s’assurer que le prestataire choisi est autorisé à prendre en charge ces déchets.

Une responsabilité jusqu’à l’élimination finale

Cette responsabilité ne s’arrête pas au moment où le déchet quitte l’entreprise : elle s’étend jusqu’à son élimination ou sa valorisation finale. En clair, l’entreprise doit garantir que ses déchets suivent des filières conformes et durables, que ce soit par le réemploi, le recyclage ou la valorisation énergétique.

Les structures publiques également concernées

Le principe de responsabilité ne se limite pas au secteur privé. Les collectivités, administrations et établissements publics sont également soumis aux mêmes obligations en matière de gestion des déchets. Ils doivent assurer la traçabilité, le tri, et la valorisation de leurs déchets, conformément aux dispositions légales en vigueur.

Les obligations générales des entreprises

Qui est concerné ?

Toutes les entreprises qui produisent ou détiennent des déchets ont l’obligation de les trier à la source. Cette règle s’applique à tous les secteurs et à toutes les tailles d’entreprises. Dès qu’une activité génère des déchets ou que le personnel jette des rebuts, le tri devient obligatoire.

Quels déchets doivent être triés ?

Le tri à la source s’applique à une large variété de matériaux. Les papiers, métaux, plastiques, verre, bois et textiles (fibres naturelles et synthétiques) doivent être collectés séparément. Les biodéchets, ainsi que tous les déchets composés à plus de 50% de matières organiques, entrent également dans cette obligation. Tout comme les huiles alimentaires si votre entreprise en produit ou en détient plus de 60 L par an. En dessous de ce seuil, elles peuvent être triées avec les biodéchets.

Attention : les déchets dangereux ou toxiques, comme les PCB ou certains biodéchets contaminés, ne doivent jamais être mélangés. Ils suivent des filières spécialisées.

Les déchets relevant de la responsabilité élargie du producteur obéissent eux aussi à des règles précises.

Dans le secteur du BTP, les matériaux de chantier et de démolition doivent être triés selon les obligations en vigueur. Les distributeurs de matériaux les reprennent souvent.

types de déchets en entreprise

Comment organiser le tri à la source ?

Chaque catégorie de déchets se collecte dans un contenant distinct, facile d’accès pour le personnel. Les établissements choisissent des dispositifs adaptés à leurs activités. Objectif : permettre un tri quotidien des déchets alimentaires, des emballages, des papiers et des textiles.

Dans les établissements recevant du public (ERP) qui produisent plus de 1 100 litres de déchets par semaine, il est nécessaire de mettre à disposition du public des points de collecte séparés, distinguant les emballages ménagers des biodéchets.

Pour les grandes surfaces alimentaires de plus de 2 500 m², un point de reprise des emballages issus des achats doit être installé à la sortie des caisses, afin de favoriser le recyclage et la valorisation des déchets.

Transport et transferts transfrontaliers

Le transport des déchets fait l’objet d’un encadrement strict. Les entreprises qui transportent des déchets dangereux doivent se déclarer auprès du préfet lorsqu’elles collectent plus de 100 kg par chargement. Pour les déchets non dangereux, ce seuil est de 500 kg par chargement.

Le transporteur veille à acheminer les déchets vers des installations conformes. Il s’assure qu’ils ne sont ni abandonnés ni déversés illégalement et signale immédiatement tout incident.

La réglementation européenne et internationale encadre les transferts transfrontaliers de déchets. Ces règles varient selon le type de déchet, l’opération concernée (valorisation ou élimination) et les pays impliqués.

La hiérarchie des modes de traitement à respecter

Dans une entreprise, la gestion des déchets ne se limite pas à leur collecte. C’est un véritable chemin à emprunter : une hiérarchie des modes de traitement2, pensée pour maximiser la réutilisation, préserver les ressources et réduire l’impact environnemental.

Cette hiérarchie n’est pas une simple recommandation : elle est inscrite dans la directive cadre européenne sur les déchets et dans le Code de l’environnement. L’ordre des priorités est clair :

PrioritéMode de traitementExplication
1Prévenir et réduire à la sourceLe meilleur déchet est celui qui n’existe pas : éco-conception, achats responsables, diminution des emballages, meilleure organisation logistique. Moins de déchets = moins de coûts de gestion.
2Préparation en vue de la réutilisation / réemploiOffrir une seconde vie aux objets sans transformation lourde : réparer un mobilier de bureau, remettre en état une pièce détachée, reconditionner du matériel.
3RecyclageTransformer la matière en une nouvelle ressource. Inclut aussi le traitement des matières organiques (compostage, méthanisation) pour produire des MPR (matières premières secondaires).
4Autres formes de valorisationValorisation énergétique lorsque le recyclage n’est pas possible. Par exemple : incinération avec récupération de chaleur pour produire de l’énergie et limiter l’enfouissement.
5Élimination (en dernier recours)Stockage en décharge ou incinération sans récupération. Concerne uniquement les déchets ultimes et doivent rester l’exception. L’élimination peut avoir un impact environnemental significatif.

Sanctions en cas de non-conformité

Il existe un cadre strict de sanctions pour les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations environnementales.

Des contrôles rigoureux sur le terrain

Les installations classées (ICPE) font l’objet d’inspections régulières, le transport des déchets est scruté par les services de l’État, et les transferts transfrontaliers passent sous le contrôle des douanes. De leur côté, les mairies peuvent engager des démarches en cas d’irrégularité sur leur territoire.

D’autre part, depuis 2013, une cellule interministérielle coordonne les actions contre les sites illégaux ou les trafics de déchets, avec des actions ponctuelles ou continues mobilisant l’OCLAESP, les inspecteurs de l’environnement et les magistrats spécialisés.

Les sanctions administratives : encourager le changement

Des mesures coercitives peuvent être prises pour faire respecter la réglementation : injonctions de mise en conformité, astreintes financières, consignations, amendes. Par exemple, ne pas mettre en place le tri à la source peut entraîner une amende de 750€ pour une personne physique, ou jusqu’à 3 750€ pour une personne morale3.

Sanctions pénales : les conséquences peuvent être lourdes

Dans les cas les plus graves, les sanctions pénales peuvent être appliquées. Les infractions telles que l’abandon illégal de déchets, le non-respect des obligations de suivi ou de transfert à des opérateurs non autorisés peuvent être punies de jusqu’à 4 ans d’emprisonnement et 150 000€ d’amende pour une personne physique, voire 750 000€ pour une personne morale4.

Réduire et valoriser ses déchets : nos conseils pratiques

Voici quelques conseils pratiques pour adopter une gestion des déchets durable et efficace dans le cadre de votre activité.

Adopter l’éco-conception et les achats responsables

Privilégier des produits durables, réparables et recyclables permet de limiter les déchets dès la conception. Une politique d’achats responsables inclut aussi la location, l’achat d’occasion ou le choix de produits en vrac, afin de réduire les emballages et les rebuts.

Mettre en place une politique zéro déchet et revoir ses modes de consommation

Réduire la production de déchets passe par la mise en place d’une stratégie basée sur les « 4R » : refuser, réduire, réutiliser/réparer et recycler. Limiter les impressions, favoriser la dématérialisation ou optimiser la consommation de fournitures sont autant de gestes simples qui ont un impact durable.

Installer des bornes de tri et penser au réemploi

Le tri sélectif des papiers, plastiques, cartons ou gobelets est essentiel pour maximiser la valorisation des déchets. Avant de jeter, il est important de réfléchir au réemploi : mobilier, équipements ou emballages peuvent souvent être réutilisés ou transformés.

Composter les biodéchets et valoriser énergétiquement

Nous l’avons vu : les déchets organiques peuvent être compostés pour produire un amendement naturel. Ils peuvent aussi être transformés grâce à la valorisation énergétique : méthanisation, production de biogaz ou d’électricité. Ces solutions réduisent la dépendance aux énergies fossiles et limitent l’empreinte carbone de l’entreprise.

modes de traitement à respecter

Sensibiliser les collaborateurs pour un engagement durable

L’implication des équipes est clé. Des formations, des campagnes d’information et une signalétique claire permettent de diffuser les bonnes pratiques, d’encourager l’adoption des écogestes et de créer une culture d’entreprise responsable.

Adopter ces bonnes pratiques ne se limite pas à respecter la réglementation : c’est un véritable levier pour améliorer la performance de l’entreprise, renforcer son image et contribuer activement à la protection de l’environnement.

Sources :

  1. ADEME – Déchets chiffres-clés : L’essentiel Édition 2024 ↩︎
  2. Ministère de la Transition écologique – Traitement des déchets ↩︎
  3. Service-public.fr – Tri à la source des déchets des entreprises : ce qu’il faut savoir ↩︎
  4. Service-public.fr – Gestion des déchets de l’entreprise : ce qui doit être mis en place ↩︎

Ça peut vous intéresser